aidan & aliénor

Le soleil s'était couché il y a quelques heures, assombrissant le jardin de la demeure des Stackhouse. Il fit place à une lune, complètement ronde, dont les reflets lumineux traversaient les arbres. Aliénor était sortie marcher quelques instants, appréciant la fraîcheur du vent sur sa peau. Elle errait ainsi, sans but, le long d'un parc qui semblait abandonné par toutes vies. Vêtue d'une simple robe d'été, ne portant pas de chaussures, la jeune fille profitait du calme de la campagne, de la sensation de l'herbe humide sur ses pieds. Certes, Conroe n'était pas une grande ville mais Bon Temps avait su garder un état presque.. Sauvage. Sa campagne et ses forêts semblaient être restées intactes au fil des années et Aliénor ne pouvait que jouir de cette tranquillité nouvelle.

Alors qu'elle arpentait des sentiers inconnus, Aliénor fut interrompue par un grondement sourd. Elle s'arrêta, surprise par ce son qui lui était inconnu. Cela semblait être le grognement menaçant d'un animal. Tendant l'oreille, la jeune femme entendit une nouvelle fois le grondement, il semblait plus proche d'elle, ce qui eut pour effet de la paniquer. Son coeur s'emballa brusquement, ses yeux s'agrandirent légèrement : réflexes humains face à la peur. Le grognement reprit de plus belle et le regard d'Aliénor fut attiré par deux yeux jaunes enfouis dans les broussailles. Son coeur fit un bond dans sa poitrine et elle ne put retenir un petit cri, mélange d'effroi et de surprise. Sans réfléchir une seconde de plus, Aliénor se mit à courir comme jamais elle ne l'avait fait auparavant, écorchant ses pieds sur les cailloux sans pour autant ressentir la douleur : La peur était bien trop présente en elle pour se soucier de petites blessures.

Aliénor ne sut pas si la bête l'avait suivi, elle ne se retourna pas pour le vérifier. Tout ce qu'elle savait, c'est qu'elle déboulait face à une maison qu'elle ne connaissait pas et qu'elle n'allait pas se faire prier pour s'y mettre à l'abris. Une fois arrivée sous le porche de la maison, elle frappa de toutes ses fortes à la porte, priant pour que son propriétaire soit bien là.

▬ S'il vous plait, Laissez-moi entrer ! S'écria la demoiselle en détresse tout en continuant de frapper à la porte de ses petits poings. Bien sûr, à cet instant, Aliénor n'avait aucune idée de ce qui pourrait lui arriver. Elle ne pouvait pas imaginer qu'en voulant échapper à une bête surnaturelle, elle se jetait dans la gueule d'un autre type de monstre...

Frappant toujours à la porte de toutes ses forces, Aliénor n'eut pas le temps de calculer que le propriétaire de cette maison venait de lui ouvrir la porte. Poussée en avant par la force de ses bras, la jeune fille trébucha et se rattrapa de justesse aux rebords de la porte. Lorsqu'elle releva les yeux, un homme dès plus étrange se tenait face à elle. Ses vêtements étaient aussi sombres que sa peau était pâle et Aliénor se rendit soudainement compte du ridicule de la situation. Le sang lui monta aux joues, elle était bien gênée, à présent, de devoir expliquer sa folle course alors que son poursuivant avait l'air d'être parti depuis bien longtemps. Reprenant peu à peu ses esprits, son coeur retrouva un rythme plus serein. Aliénor se redressa, sourit, espérant faire bonne figure.

▬ Je... Commença-t-elle sans savoir comment terminer sa phrase. Qu'allait-elle dire ? Que des yeux jaunes l'ont regardé, que cet animal avait grogné et qu'elle avait paniqué ? Mais comment expliquer qu'elle ait déboulé comme une furie sur le perron d'un inconnu ? ▬ J'ai vu quelque chose qui m'a inquiété, je ne me sentais plus en sécurité. Finit-elle par avouer sans trop en dire sur sa course effrénée. De toute façon, son halètement, ses joues rosie par l'effort et l'état de ses pieds indiquaient clairement ce qui lui était arrivé, du moins, pour tout bon observateur et elle espérait que cet homme n'en soit pas un.

▬ Je m'excuse de frapper si tard à votre porte. Elle hésita une seconde puis, légèrement honteuse, finit par demander : Auriez-vous un verre d'eau ?

L'étranger souriait d'un air amical mais Aliénor n'était pas entièrement rassurée, ses yeux extrêmement bleus étaient entourés de cernes rougeâtres. Etait-ce un drogué ? Ou était-il malade ? Quelle que soit la réponse, la jeune fille ne souhaitait pas s'attarder trop longtemps mais sa soif était trop importante pour qu'elle fasse demi-tour maintenant.. Et puis, elle ne l'aurait avouer pour rien au monde mais elle n'avait pas forcément envie de revenir sur ses pas alors que la chose dans les buissons y était peut être encore..

Répondant à sa demande, l'homme s'écarta de la porte, la laissant entrer. Aliénor entra donc et découvrit une maison très sombre, décorée de façon minimaliste avec quelques anciens meubles, il était presque difficile d'imaginer un être vivant y habiter. Alors que la jeune fille avançait pas à pas vers le salon, elle sentait la présence de l'inconnu derrière elle. Aliénor n'avait aucune raison apparente de s'inquiéter mais le savoir dans son dos la mettait fort mal à l'aise. L'homme finit par s'éloigner dans une autre pièce et elle en fut visiblement soulagée. Son coeur ralentissait, sa peau retrouvait une teinte normal, elle aurait pu paraître tout à fait normale s'il n'y avait pas ses pieds plein de terre et sa robe chiffonnée.

L'inconnu revint et ils s'assirent tout deux sur le canapé. Aliénor le remercia puis but une longue gorgée d'eau. La fraîcheur du liquide lui glaça la langue, elle apprécia cette sensation après les bouffées de chaleur dont elle fut victime quelques minutes auparavant.

▬ Je viens de Conroe, je suis arrivée récemment à Bon Temps. Répondit-elle. C'est une ville très charmante.. Continua Aliénor pour combler le silence qui lui semblait pesant.

L'homme avait un comportement étrange qu'Aliénor ne comprenait pas. Habituellement, elle était plutôt douée pour comprendre ce que ressentait les gens, c'était un don qu'elle avait hérité des origines de sa mère bien qu'elle n'en sache pas tellement plus. Mais à cet instant, elle n'arrivait pas à cerner le personnage qui se tenait à ses côtés et elle ne put s'empêcher de le regarder avec étonnement.

▬ Ça va bien mieux à présent. Finit-elle par répondre avec un sourire poli. Vous vivez ici depuis longtemps ?

Elle tentait de faire la conversation et c'était bien la seule idée qui lui avait traversé l'esprit. Aliénor était toujours assise sur le canapé, elle tenait dans ses mains le verre d'eau que lui avait gentiment donné l'homme. Intimidée et n'osant pas croiser le regard rougi de l'homme, Aliénor baissa les yeux vers le sol. La nuit devenait de plus en plus noire et elle n'avait aucune idée de comment se sortir de ce pétrin. Était-il normal pour cet homme d'être encore debout à cette heure-ci ? Avait-il pour habitude d'accueillir des gens au beau milieu de la nuit ? Il semblait si courtois et agréable, Aliénor ne s'imaginait pas réagir de la même sorte si un inconnu venait frapper à sa porte à une telle heure. Elle l'aurait sans doute accueilli avec un fusil de chasse.

▬ Je crois que j'abuse de votre politesse. Il est tard, je devrais rentrer et vous laisser en paix.